Vaccin Covid : pour ou contre, une défiance à la française?

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Les personnes atteintes de maladies chroniques se feront-elles vacciner contre la Covid ? Oui, répond une faible majorité. Face à la défiance perceptible, l'Académie de médecine tape du poing sur la table et appelle à la responsabilité collective.

 

Se faire vacciner ou pas contre la Covid ? C'est la question qui monopolise l'esprit des Français depuis quelques jours. 63 % des personnes de 65 ans et plus et 53 % des patients atteints de maladie chronique se déclarent prêts. C'est ce que révèle un sondage de l'Institut Viavoice, réalisé fin novembre pour France assos santé. Une très faible majorité néanmoins pour cette seconde catégorie, proche des résultats de l'enquête CoviPrev de Santé publique France : tous publics confondus, le taux de personnes acceptant de se faire vacciner est passé de 64 % en juillet 2020 à 53 % en novembre. 

Un choix éclairé

Alors qu'elle a déjà débuté, par exemple en Angleterre, la première phase de vaccination contre le virus Sars-Cov-2, doit démarrer début 2021, voire entre le 26 et le 28 décembre, selon Olivier Véran, ministre de la Santé, en France. D'après le calendrier en cinq phases préconisé par la Haute autorité de santé (HAS), elle concernera en priorité les populations les plus vulnérables ayant le plus de risques de développer des formes graves de la maladie (article en lien ci-dessous). Pour France assos santé qui dit « prendre la mesure du défi qui nous attend », c'est « indiscutablement une lueur d'espoir ». Si, selon l'association, des« inquiétudes s'expriment, toutes légitimes », elle voit dans les résultats de ce sondage « un score encourageant, et surtout susceptible d'évoluer ». Si se « faire vacciner est une décision individuelle, c'est aussi un acte altruiste » puisque « sans cette dimension collective, pas d'immunité à grande échelle, pas de place dans nos hôpitaux pour les personnes atteintes d'un cancer ou en attente d'une greffe, pas de sérénité pour les plus âgés d'entre nous, et pas de retour à une vie normale avant longtemps ». Pour autant, cette adhésion ne peut se faire que si « la confiance issue d'une information loyale, honnête et actualisée » est au rendez-vous. L'association réclame donc la plus grande transparence sur les éventuelles réactions et effets indésirables pour permettre à chacun un « choix éclairé ». « Pas d'efficacité, aussi haute soit-elle annoncée, sans une sécurité optimale. Urgence ou pas, la balance favorable bénéfice/risque reste l'alpha et l'oméga », conclut France assos santé alors que les anti-vax se déchaînent invoquant des arguments alarmistes et, au passage, quelques contre-vérités : décès suspects de personnes vaccinées, modification du génome, effets de la rupture de la chaîne du froid...

Contexte de défiance

Dans ce contexte, l'Académie nationale de médecine prend position le 15 décembre dans un communiqué, ne mâchant pas ses mots : « La proximité inattendue de cette perspective réveille une hésitation vaccinale dont la France aurait le regrettable privilège d'être le porte-drapeau ». Sa position est sans équivoque : « Vaccination contre la Covid-19, pourquoi hésiter ? ». Elle déplore « la prudence exprimée par certains médecins soucieux de connaître les résultats définitifs des essais de phase 3, puis alléguant le manque de recul pour se forger une opinion, amplifiée et parfois dévoyée par les médias »,qui « conforte un sentiment de méfiance dans le grand public ». Elle juge les « résultats (des recherches scientifiques) spectaculaires ». En effet, moins d'une année après l'émergence de la pandémie, 180 candidats-vaccins sont en cours de développement, parmi lesquels 48 sont en phase d'essai clinique chez l'homme dont 11 en phase 3. La Commission européenne a préacheté près de 1,5 milliard de doses pour ses Etats membres, dont 200 millions pour la France. 

Les arguments en faveur du vaccin

Consciente du trouble que génère dans les esprits l'imminence d'une campagne vaccinale sans précédent, l'Académie nationale de médecine tape du poing sur la table, en déployant une liste d'arguments. Elle rappelle que la Covid-19 a tué, en dix mois, plus de 1,6 million de personnes dans le monde, dont 57 000 en France, provoqué une récession économique mondiale et aggravé les situations d'extrême pauvreté. Malgré l'application la plus stricte des mesures de prévention, aucun pays n'a encore réussi à éliminer ce virus. Même dans ceux les plus affectés par la pandémie, les niveaux d'immunité collective sont trop faibles pour escompter un ralentissement spontané de sa propagation. La seule réponse pour contrôler cette épidémie en 2021 serait donc « l'initiation précoce d'une campagne internationale de vaccination de grande ampleur ». Elle assure que les performances des premiers vaccins disponibles utilisant la technologie nouvelle de l'ARN messager, produits par Pfizer-BioNTech et Moderna, offrent un « rapport bénéfices/risques très favorable », en admettant tout de même que « des études complémentaires restent nécessaires, notamment pour préciser la durée de la protection et l'impact sur la transmission ».

La délivrance d'une AMM (autorisation de mise sur le marché) par l'EMA (Agence européenne des médicaments) est attendue pour le 21 décembre 2020. L'Académie de médecine espère qu'elle « permettra de lever toute réticence au sein du corps médical français et de motiver l'ensemble du personnel soignant ». « Chacun prendra sa décision en connaissance de cause », ajoute de son côté France Assos santé.

France assos santé a organisé, le 10 décembre 2020, un webinaire autour des enjeux de la vaccination anti-Covid-19, avec quatre spécialistes des vaccins et de santé publique. Disponible en replay sur www.france-assos-sante.org

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