Droits des personnes handicapées : la France ne respecte pas ses engagements internationaux

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Dans un récent rapport, le Défenseur des droits dresse le bilan de la mise en œuvre de la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapés. Il pointe des avancées et beaucoup de retards, voire des reculs.

C’était il y a dix ans tout juste. En mars 2010, la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées (CIDPH) entrait en vigueur dans le droit national. En ratifiant ce texte, la France s’engageait à prendre toutes les mesures appropriées pour mettre en œuvre, de manière effective, les droits reconnus par la Convention. L’a-t-elle fait ?

« D’importantes lacunes subsistent. »

« Le bilan est contrasté », souligne le Défenseur des droits, dans son rapport rendu public début juillet. Cette autorité indépendante a pour mission d’assurer le suivi de l’application de la Convention. « Si de nombreux progrès ont été réalisés ces dernières années, d’importantes lacunes subsistent », précise-t-il.

Droit de voter pour les majeurs protégés

Côté avancées, il pointe, entre autres, la pleine reconnaissance par la loi, en février 2019, pour tous les majeurs protégés, du droit de voter, se marier, se pacser et divorcer sans autorisation préalable du juge.

Mesures contre les violences conjugales

Le Défenseur des droits se félicite également que la situation particulière des femmes en situation de handicap soit enfin prise en compte dans les plans de lutte contre les violences. Le Grenelle des violences conjugales a ainsi débouché, en novembre 2019, sur différentes mesures spécifiques. Une nécessité car les femmes en situation de handicap sont davantage exposées que les autres.

Femmes handicapées, femmes  » invisibles »

Mais il regrette que cette avancée reste isolée. « Les femmes handicapées sont un angle mort des politiques publiques ». Qu’il s’agisse d’emploi, de santé, d’éducation ou bien encore de protection sociale. « Plus encore que les hommes handicapés, elles restent invisibles dans de nombreuses sphères de la société. »

Différence de traitement selon l’âge de survenue du handicap

Parmi les autres lacunes, il souligne « la différence de traitement entre les personnes selon l’âge auquel survient le handicap, avant ou après 60 ans ». Les droits sont effet différents (ex. : prestation de compensation du handicap pour les uns ; allocation personnalisée d’autonomie pour les autres). Ce qui compromet le respect des principes d’autonomie individuelle, d’indépendance et de non-discrimination prônés par la Convention.

Une dépendance financière aggravée

Le Défenseur des droits critique également la dépendance financière des personnes handicapées à l’égard de leur conjoint. En cause : la prise en compte des ressources de ce dernier pour le calcul de l’allocation adulte handicapé (AAH). Et la réforme de l’AAH, mise en œuvre par le gouvernement en 2018, « aggrave » cette situation.

Le rapport met aussi en évidence « les insuffisances des allocations accordées aux parents d’enfants handicapés ».

La France bientôt devant un comité de l’Onu

« La France n’a pas encore pleinement pris en considération le changement de modèle qu’induit la Convention », conclut le Défenseur des droits. Le Comité des droits des personnes handicapées des Nations unies doit prochainement statuer sur le cas français. Initialement prévu pour septembre 2020, l’examen a été reporté sine die (*) en raison de la crise sanitaire. La France ne perd rien pour attendre.

(*) Sans nouvelle date.

Un texte fondateur

L’originalité de la Convention consiste à proposer une approche de la situation de handicap par les droits et libertés. Elle ne crée pas à proprement parler de nouveaux droits qui seraient spécifiques aux personnes handicapées. Mais elle décline une série de mesures pour que les droits de l’Homme s’appliquent véritablement à ces citoyens.

En 2018, les associations françaises de personnes handicapées avaient publié leur propre rapport sur la mise en œuvre de ce texte par l’État français. Elles pointaient « de graves manquements ».

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