Covid : sans carte bancaire, quid des majeurs sous tutelle?

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Face à la propagation du virus, de plus en plus de commerçants refusent les pièces et billets. Or 5 % des Français n'ont pas de carte bancaire, notamment certains majeurs sous tutelle ou curatelle. Des associations interpellent les pouvoirs publics.

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Pour faire face au Covid-19 et tenter de limiter la contagion, les pièces de monnaie et billets sont invités à rester dans nos porte-monnaie. Selon le ministère de la Santé et la Banque de France, ce risque est « très faible » mais « pas nul ». Les autorités chinoises, par exemple, ont détruit de nombreux billets issus des zones contaminées (notamment de la ville de Wuhan) et ont imprimé en urgence plusieurs dizaines de milliards de nouveaux « sains » ; le pays nettoie le reste de sa monnaie en la passant aux ultraviolets ou à haute température avant de la placer sous scellés entre sept et quatorze jours. Dans le doute, en France, de plus en plus de commerçants exigent, même pour des sommes minimes, le paiement en carte bancaire, de préférence sans contact.

Non accès aux besoins de base

Mais comment faire pour les 5 % de personnes qui, en France, n'en disposent pas? C'est le cas des majeurs bénéficiant de mesures de protection qui, en grand nombre, se trouvent en situation de handicap, notamment mental ou psychique. Une carte de crédit ne peut être délivrée à ceux sous tutelle ou curatelle renforcée qu'avec l'accord d'un juge. « Ils ne peuvent régler leurs achats qu'en espèces et ont besoin d'avoir accès à un guichet pour retirer de l'argent », explique l'Interfédération protection juridique des majeurs (FNAT, Unaf, Unapei), or les banques ferment leurs portes et ne permettent plus ce type de retrait. Ces trois associations jugent que « le paiement en espèces est vital pour les personnes vulnérables » qui, « particulièrement touchées par le confinement », ne peuvent plus « subvenir à leurs besoins de base (alimentation, produits d'hygiène...) ». A ce titre, elles demandent à l'Etat et aux acteurs économiques « d'assurer un service minimum ». C'est l'une des questions qui figurent dans la FAQ mise régulièrement à jour par le secrétariat d'Etat au Handicap (article en lien ci-dessous) : « Je rencontre des difficultés pour payer mes courses en espèces, y-a-t-il des consignes données aux commerces pour refuser ce mode de paiement ? ». Voici sa réponse : « Aucune consigne n'a été donnée (…). Il a cependant été donné des consignes sur les bons gestes à suivre pour ce type de règlement. »

Contre la loi

L'interfédération dit avoir saisi en urgence la Direction du Trésor, la DGCCRF (répression des fraudes), l'ACPR (Autorité de contrôle prudentiel), le ministère des Solidarités et de la Santé, le ministère de la Justice, ainsi que le Défenseur des droits. « En attendant une réponse ferme et protectrice de nos concitoyens, c'est directement aux commerçants et aux réseaux bancaires que nous nous adressons pour qu'ils acceptent les paiements en espèces et maintiennent leurs services, dans le respect de la loi et des mesures liées à l'état d'urgence sanitaire », encourage-t-elle dans un communiqué. Rappelons que le refus de paiement en espèces est puni d'une contravention de deuxième classe (article R. 642-3 du code pénal).

Les aides sociales versées le 4 avril

Par ailleurs, le versement des aides sociales (AAH, RSA, allocations familiales…) interviendra en avance le samedi 4 avril 2020, au lieu du lundi 6. Une décision du ministère des Solidarités pour que chacun puisse les toucher « à temps ». Et pour ceux qui n'ont pas de carte de retrait ? Le secrétariat d'Etat au Handicap assure que, pour ceux qui ont un compte à La Banque postale -plus de la moitié des foyers bénéficiaires des minima sociaux en sont clients, dont plus de 1,5 million viennent retirer leurs allocations en espèces dans les bureaux de poste chaque mois-, « un dispositif exceptionnel sera mis en place pour permettre aux allocataires de pouvoir retirer leur argent au guichet », portant à 1 850 le nombre d'agences postales ouvertes à compter du 6 avril. Actuellement, sur les 7 700 bureaux de poste en France, seuls 1 600 n'ont pas encore baissé le rideau.

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