PCH : les heures non réalisées seront-elles facturées ? (13/08/2020)

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Karyne a dû régler, via sa PCH, des prestations d'auxiliaires de vie non réalisées. Ce dispositif permettait aux Saad de faire face à la baisse de recettes durant le confinement. Mais un décret du 29 juin rectifie heureusement le tir.

 

Dernière minute du 29 juillet 2020
Bonne nouvelle ! Le décret n° 2020-822 du 29 juin 2020 (en lien ci-dessous) précisant les modalités de financement des services d'aide et d'accompagnement à domicile dans le cadre de l'épidémie de covid-19 vient rectifier la décision initiale, jugée « injuste ». « Les services d'aide et d'accompagnement à domicile ne facturent pas les bénéficiaires lorsque les interventions n'ont pas été réalisées », précise-t-il. Mais il ajoute : « en dehors des possibilités prévues contractuellement en cas d'annulation par le bénéficiaire ». Cette mesure ne concerne donc pas les personnes qui, pour des raisons de santé, auraient annulé les prestations de leur plein gré, à moins qu'elles n'aient respecté le préavis figurant dans leur contrat. Décret à l'appui, les allocataires de la PCH qui ont été surfacturés peuvent donc demander le remboursement des heures non effectuées à leur prestataire ou tout au moins leur report sur les prochains mois. Pour tout comprendre, consulter l'article initial ci-dessous.  


Article initial du 3 juin 2020

Le courrier qu'a reçu Karyne Benharouch, maman d'une petite fille en situation de handicap, est sans équivoque : « La réglementation relative au Covid 19 permet au service d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad) de facturer les interventions planifiées pour le mois d'avril »… même si elles n'ont pas été réalisées ! Signé : le conseil départemental des Bouches-du-Rhône. Elle donc régler ces heures via sa PCH (prestation de compensation du handicap) même si l'une de ses deux auxiliaires de vie, malade, ne s'est jamais rendue à son domicile.

Etat d'urgence

En effet, dans le cadre de la crise du Covid-19, l'ordonnance n°2020-313 du 25 mars 2020 prévoit un mécanisme de compensation financière en cas de sous-activité ou de fermeture temporaire d'un ESMS (établissements et services médico-sociaux). Ainsi, « pour la part du financement qui ne relève pas d'une dotation ou d'un forfait global (qui sont maintenus quoi qu'il arrive), la facturation est établie à terme mensuel échu sur la base de l'activité prévisionnelle, sans tenir compte de la sous-activité ou des fermetures temporaires résultant de l'épidémie de covid-19 ». Cette mesure est en vigueur depuis le 12 mars 2020 jusqu'à la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire, fixée, pour le moment, au 10 juillet 2020.  

Un procédé malhonnête ?

Cette mesure a pour objectif de prémunir les ESMS contre la baisse de leurs recettes. « Pour assurer une stabilité financière et ne pas mettre en péril ces services, on nous demande de nous acquitter de ces heures non réalisées, s'insurge Karyne. Il est clair que ce n'est pas trop logique ». Cerise sur le gâteau, son prestataire précise, dans un autre courrier, que « pour éviter le déplacement des salariés en ces temps de confinement, nous vous proposons de nous adresser les CESU (Chèque emploi service universel) » du mois suivant. Membre du collectif Handi actif France, elle juge ce procédé « malhonnête » et « fait sur le dos de nos enfants ».

Une autre maman a, quant à elle, décidé d'interrompre les interventions par peur de la contamination sans n'avoir jamais été informée de cette disposition par son prestataire. L'assistante sociale de la Maison de l'autonomie du Morbihan lui a assuré qu'elle ne devait rien régler. Si certains bénéficiaires de la PCH encouragent à « refuser », d'autres répondent qu'ils n'ont pas eu le choix, a fortiori lorsque le Conseil départemental règle directement le prestataire. On observe donc une disparité d'application selon les départements, qui complique la tâche des usagers.

Lissage des heures impossible

Karyne n'aura, certes, rien à débourser puisque cette prestation est réglée via sa PCH. Mais, « pour faire face à la reprise lente et progressive du centre », et parce que l'institut médico-éducatif qui accueille sa fille a fermé et qu'elle a dû s'occuper d'elle non-stop durant huit semaines, elle comptait reporter cette enveloppe d'heures non utilisées les mois suivants, pour « souffler ». En effet, dans le cadre du chantier de la Conférence nationale du handicap et la loi Mouiller sur l'évolution de la PCH en février 2020, un nouveau texte précise que le conseil départemental n'aura plus le droit de contrôler l'utilisation de la PCH sur une période de référence inférieure à six mois (contre un mois jusqu'à maintenant), permettant aux bénéficiaires de consommer leur aide humaine comme ils l'entendent, d'un mois sur l'autre (article en lien ci-dessous). Par exemple, une personne disposant de 100 heures mensuelles pourra n'utiliser que 80 heures en janvier et reporter son solde de 20 heures sur un autre mois, dans un délai de six mois maximum. Mais les décrets d'application n'ont toujours pas été publiés…

Un autre point délicat soulevé notamment par APF France handicap est que certains auxiliaires de vie ont pu bénéficier des dispositions relatives au chômage partiel. Dans ce cas, est-il cohérent qu'ils puissent jouer sur les deux tableaux ? S'ils sont indemnisés du fait de leur absence, pourquoi devoir, en même temps, les rémunérer via la PCH ? Lorsque le bilan sera tiré de cette crise sans précédent, ses allocataires seront-ils « remboursés » et pourront-ils, ainsi, récupérer les heures non effectuées ? L'association réitère cette demande de « lissage » sur les futurs plans d'aides…

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