Inclusion enfant handicapé, le CESE dénonce trop de freins (12/06/2020)

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Améliorer la couverture des soins, créer un portail d'information unique... Le CESE publie un avis intitulé "Enfants et jeunes en situation de handicap : pour un accompagnement global". Au menu: 20 préconisations pour une inclusion (enfin) effective

 



Quinze ans après l'adoption de la loi de 2005 pour l'égalité des chances, « l'inclusion est loin d'être une réalité », notamment pour les enfants en situation de handicap, observe le Conseil économique, social et environnemental (CESE). « Il persiste de très graves difficultés dans l'inclusion scolaire, la prise en charge sociale, l'accès aux soins et l'accès à la culture », martèle-t-il. De nombreuses pétitions adressées aux pouvoirs publics viennent les illustrer et pointent les obstacles auxquels sont confrontés les parents avant même d'accéder à un diagnostic, des parcours scolaires hachés, la précarité de la situation des Accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) ou encore le manque de coordination entre les professionnels. Ces pétitions ont conduit le CESE à présenter un projet d'avis sur ce « sujet transversal », le 10 juin 2020, en séance plénière, adopté à 121 voix contre une abstention. Au programme : 20 préconisations pour un « accompagnement global » des jeunes en situation de handicap.

Organiser le système autour des enfants

Dans ce rapport de 85 pages (en lien ci-dessous), Samira Djouadi et Catherine Pajares y Sanchez formulent des propositions « en gardant à l'esprit la philosophie de la loi de 2005, celle de l'inclusion », annoncent-elle en préambule. « Il faut l'appliquer aux enfants vivant avec un handicap, dans ses deux dimensions : favoriser l'accomplissement de chaque enfant en lui permettant de partager la vie des autres, et ne négliger aucune chance pour qu'il progresse vers l'autonomie », précisent-elles. Quel changement cela implique-t-il ? « De passer d'une logique de prise en charge, qui se concrétise trop souvent par une mise à l'écart, à une logique d'accueil, d'accompagnement, de soutien coordonné et d'adaptation permanente de la réponse aux évolutions des besoins », répondent les rapporteuses. Selon elles, cela suppose une réflexion plus systémique : « Il faut organiser le système autour des enfants et des jeunes, et non pas autour des structures dont le rôle et le fonctionnement doivent être interrogés ».

Diagnostic : pour un accompagnement précoce

Les premières préconisations concernent le diagnostic : « faire du repérage du handicap une priorité et mettre en place un accompagnement plus précoce des enfants et de leur famille ». Le CESE recommande également d'organiser l'annonce du handicap ou de sa suspicion autour de plusieurs objectifs : une information complète sur le trouble, ses éventuelles évolutions, les accompagnements envisageables, les prises en charge financières, mais aussi une orientation vers un soutien psychologique et social, notamment via les associations de parents d'enfants en situation de handicap. « Ce sont eux les experts, soutient Sophie Cluzel, secrétaire d'Etat au Handicap, devant l'hémicycle. Il faut savoir s'appuyer sur l'expertise parentale pour ne pas perdre de temps dans la prise en charge. »

Améliorer la couverture des soins

Le CESE plaide, par ailleurs, pour une meilleure couverture des frais liés au diagnostic et aux soins. « Trop souvent, la compensation n'est pas proportionnelle aux besoins de l'enfant qui sont évolutifs », déplore le conseil. Il propose donc que l'Assurance maladie, dans l'immédiat, offre aux enfants en situation de handicap un meilleur remboursement de certaines consultations (ergothérapie, psychomotricité, psychologie) et, à plus long terme, la possibilité d'un régime forfaitaire, du même type que celui des ALD (affections de longue durée). Il juge également indispensable une adaptation de l'offre ambulatoire et hospitalière « pour la rendre plus facilement accessible aux enfants en situation de handicap dans les conditions de droit commun ». Pour cela, il préconise de créer des plateaux techniques partagés, éventuellement sur la base de ceux existants dans les établissements médico-sociaux (EMS), où les professionnels du soin pourront réaliser les consultations des enfants en situation de handicap.

Conforter l'inclusion scolaire

Autre domaine, même ambition. Le CESE exhorte le gouvernement à répondre aux besoins des élèves en situation de handicap avec des dispositifs personnalisés. « Malgré la progression de la scolarisation en milieu ordinaire notamment, un grand nombre de freins les empêchent toujours de pouvoir accéder à une éducation de qualité », déplore les rapporteuses. Afin d'améliorer leurs conditions de réussite, elles recommandent d'ajuster les effectifs des classes les accueillant : moins de 24 élèves par classe jusqu'au collège. Autres conseils : renforcer la formation initiale et continue des enseignants au repérage et à l'accompagnement des enfants handicapés et l'élargir à l'ensemble de la communauté éducative, encourager la mutualisation des missions entre les établissements scolaires et médico-sociaux, valoriser le métier d'AESH et envisager la création d'une filière des métiers de l'accompagnement... « Les AESH seront au cœur des enjeux des deux prochaines années du quinquennat, intervient Sophie Cluzel. Nous devons avancer sur la rétribution, le temps de travail, les perspectives de carrière et valoriser l'intérêt du diplôme d'accompagnant éducatif et social. »

Favoriser les activités physiques et culturelles

Le rapport recommande également que l'évaluation des besoins en aide des jeunes en situation de handicap pour participer à des activités artistiques, sportives, de loisirs ou culturelles dans les temps extrascolaires soient effectuées systématiquement par les Maisons départementales des personnes handicapées (Mdph) ou par le médecin scolaire, pour les jeunes sans projet personnalisé de scolarisation (Pps). L'objectif : faciliter les « aménagements raisonnables » qui leur permettront de participer à ces activités. En outre, des plans régionaux « handicap et culture » peuvent être élaborés sur l'ensemble du territoire, en associant en amont les acteurs régionaux et les spécialistes du handicap, pour développer des programmes d'accessibilité des lieux culturels. Leitmotiv : ces activités encouragent le développement physique et affectif, améliorent les habiletés motrices et sociales, la créativité et le développement des fonctions cognitives...

Portail unique d'information

Enfin, pour informer et guider les familles et professionnels du secteur, le CESE exhorte les pouvoirs publics à créer un portail numérique unique « enfance et handicap » portant sur l'organisation de l'accompagnement des jeunes et de leurs parents. Facile à identifier et à utiliser, il devra comprendre une information générale et claire sur les dispositifs existants et une présentation de l'offre d'accompagnement médico-social dans chaque département. Le but : atteindre tous les publics sur tout le territoire. « La complexité des situations et des réponses ne doit pas constituer une difficulté supplémentaire pour les enfants et leur famille », plaident les rapporteuses.

Enjeu de cohésion sociale

« Nous sommes encore parfois loin du déroulement et de l'ambition de la loi de 2005 », concède Sophie Cluzel, avant de saluer un « projet d'avis de grande qualité », dont elle dit «  partager la pertinence des analyses et préconisations », et qui lui sera « très utile ». « Notre avis rappelle une chose essentielle : l'inclusion des jeunes ne s'arrête pas à la porte de l'école, conclut Aminata Koné, présidente de la section des affaires sociales et de la santé. C'est un enjeu de cohésion sociale, l'action publique ne sera pas suffisante si l'ensemble de la société ne se mobilise pas. »

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